Manifestations, blocage des établissements scolaires : ce qu'il faut savoir

La mobilisation lycéenne s'amplifie depuis le 19 janvier, pour protester contre la réforme des retraites avec des appels à bloquer les établissements.
Les organisations d'étudiants, de lycéens et de jeunes appellent semaine après semaine à une mobilisation plus large. Grève, manifestations, blocages d'établissements. Quels sont les droits et les devoirs des jeunes scolarisés dans le secondaire ? Questions-réponses à l'usage des parents et des jeunes rédigées avec la consultation du Syndicat des avocats de France (SAF).

Les jeunes qu'ils soient lycéens ou collégiens peuvent-il exercer le droit de grève ?

Non, les jeunes scolarisés dans le secondaire n'ont pas le droit de grève. Ils ne sont pas salariés.

L’article R 511-11 du code de l’éducation relatif aux droits et obligations des élèves ne leur prévoit pas ce droit, mais au contraire une obligation d'assiduité aux cours.

Autrement dit, les élèves participant aux mouvements de grève, peuvent se voir notifier leur absence. Si des absences se multiplient elles peuvent faire l'objet de sanctions disciplinaires selon le règlement intérieur de l'établissement.

AVIS FCPE - La FCPE a appelé dans un communiqué de presse publié le 30 janvier 2023, à la plus grande clémence de la part des chefs d'établissement envers les élèves absents aux cours car solidaires du mouvement social contre la réforme des retraites. Au travers de cette mobilisation lycéenne, il s'agit d'entendre l'expression de leur inquiétude pour leur avenir.

Les jeunes peuvent-il manifester au sein de leur établissement  ? 

Non, il est interdit de manifester dans l'enceinte de l'établissement scolaire.

AVIS FCPE - En revanche, les jeunes peuvent s'exprimer, se réunir, discuter, et afficher des appels à mobilisation au sein de l'établissement. Ils ont aussi un droit de publication dans leur journal lycéen pour débattre de l'actualité, de la politique ou de leur vie de lycéen.

Quelle sont les règles concernant le blocage des établissements scolaires dits blocus ?

Bloquer l'entrée de l'établissement constitue un délit d'entrave à la libre circulation des personnes. Empêcher le passage des enseignants ou du personnel administratif de l'établissement est un délit d'entrave à la liberté de travailler. En revanche, tenter de convaincre d'autres lycéens de ne pas entrer dans l'établissement pour rejoindre le mouvement n'est pas pénalisé, si c'est fait sans violence. 

Les jeunes doivent également laisser entrer les autres lycéens qui le souhaiteraient.

Toute agression des personnes ou de dégradation de biens publics constituent des délits. Face à des débordements, le chef d'établissement garant de la sécurité aux abords de son établissement peut, s'il le juge nécessaire, faire appel aux forces de l'ordre.

AVIS FCPE - La FCPE demande aux chefs d'établissement un regard bienveillant et une écoute active de la jeunesse qui s'exprime. Construire le dialogue est nécessaire et formateur, l'appel aux forces de l'ordre ne doit pas être systématique pour dissiper les manifestants.

Sur quel point les parents doivent-ils être vigilants ?

Au vu du durcissement de l'intervention des forces de l'ordre lors des manifestations depuis cinq ans, la FCPE dénoncera tout débordement de la police qui pourrait avoir lieu à l'encontre de la jeunesse.

La FCPE demande aux personnels de l'Education nationale qu'il ne soit pas fait un usage abusif des textes réglementaires dont la vocation est de régir le fonctionnement routinier des établissements et pour que ne s'enclenche pas le cycle sanctions disciplinaires / réaction accrue des jeunes. Elle protestera énergiquement contre les sanctions qui pourraient être prises suite à l'absence des jeunes en cours pour aller manifester.

En tant que parents d'élèves, comment soutenir les jeunes dans leur mobilisation ?

Il y a plusieurs formes d'actions possibles. Les parents FCPE de l'établissement peuvent essayer de se relayer pour être présents le jour des blocus devant l'établissement. En étant là, les parents d'élèves peuvent expliquer les bénéfices d'une mobilisation pacifique. C'est aussi une bonne façon d'être témoins et présents si la situation dégénère. 

La FCPE appelle ses adhérents à proposer aux jeunes de participer à l'encadrement des manifestations pour que celles-ci se déroulent sans encombre et que d'éventuels casseurs ne puissent infiltrer les cortèges.

Enfin, il est très important que les parents soient présents lors des conseils d'administration et des conseils de classe pour veiller à ce que les jeunes militants ne soient ni pénalisés, ni sanctionnés suite à leur implication dans le conflit social des retraites.

Infos pratiques

Les différents textes en vigueur :


- Sur le droit de grève

Pas de droit de grève, les élèves sont soumis à une obligation d'assiduité.

Les textes de référence sont les suivants :

Article L511-1 du code de l'éducation

Les obligations des élèves consistent dans l'accomplissement des tâches inhérentes à leurs études ; elles incluent l'assiduité et le respect des règles de fonctionnement et de la vie collective des établissements.

Article R511-11 du code de l'éducation

L'obligation d'assiduité mentionnée à l'article L. 511-1 consiste, pour les élèves, à se soumettre aux horaires d'enseignement définis par l'emploi du temps de l'établissement. Elle s'impose pour les enseignements obligatoires et pour les enseignements facultatifs dès lors que les élèves se sont inscrits à ces derniers.

Les élèves doivent accomplir les travaux écrits et oraux qui leur sont demandés par les enseignants, respecter le contenu des programmes et se soumettre aux modalités de contrôle des connaissances qui leur sont imposées.

Les élèves ne peuvent se soustraire aux contrôles et examens de santé organisés à leur intention.

- Sur le droit de manifestation

Pas de droit spécifique mais c'est le droit commun qui s'applique combiné avec les dispositions du code de l'éducation notamment le droit de réunion et d'association qui s'exerce par l'intermédiaire des associations déclarées autrement dit, les "syndicats lycéens".

Les textes de référence sont les suivants :

Article R511-9

Le fonctionnement, à l'intérieur des lycées, d'associations déclarées qui sont composées d'élèves et, le cas échéant, d'autres membres de la communauté éducative de l'établissement est autorisé par le conseil d'administration, après dépôt auprès du chef d'établissement d'une copie des statuts de l'association, sous réserve que leur objet et leur activité soient compatibles avec les principes du service public de l'enseignement ; en particulier, elles ne peuvent avoir un objet ou une activité de caractère politique ou religieux. Ces associations peuvent contribuer à l'exercice du droit d'expression collective des élèves. Si les activités d'une telle association portent atteinte aux principes mentionnés au premier alinéa, le chef d'établissement invite le président de l'association à s'y conformer.

En cas de manquement persistant, le chef d'établissement saisit le conseil d'administration qui peut retirer l'autorisation après avis du conseil des délégués pour la vie lycéenne.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux associations créées en application de l'article L. 552-2.

Article R511-10

Dans les lycées et collèges, la liberté de réunion s'exerce à l'initiative des délégués des élèves pour l'exercice de leurs fonctions.

Dans les lycées, elle s'exerce également à l'initiative des associations mentionnées à l'article R. 511-9 ou d'un groupe d'élèves de l'établissement pour des réunions qui contribuent à l'information des élèves.

Le droit de réunion s'exerce en dehors des heures de cours prévues à l'emploi du temps des participants.

Le chef d'établissement autorise, sur demande motivée des organisateurs, la tenue des réunions en admettant, le cas échéant, l'intervention de personnalités extérieures. A cette occasion, il peut solliciter l'avis du conseil d'administration. Il peut opposer un refus à la tenue d'une réunion ou à la participation de personnalités extérieures lorsque celles-ci sont de nature à porter atteinte au fonctionnement normal de l'établissement ou à contrevenir aux principes du service public de l'enseignement. L'autorisation peut être assortie de conditions tendant à garantir la sécurité des personnes et des biens

- Sur le blocage

Les sanctions sont à l'appréciation du chef d'établissement. En règle générale, on conseille aux élèves de s'associer avec les enseignants pour éviter des sanctions éventuelles. Pour le coup, en cas de blocage, ils risquent les sanctions disciplinaires liées à l'atteinte au fonctionnement de l'établissement et le respect du règlement intérieur. Les sanctions sont prévues à l'article R511-13 du code de l'éducation avec une petite spécificité pour les lycées militaires (article R511-17).

L'ensemble de la procédure de procédure disciplinaires est prévue par les articles R511-12 à D511-58 et a été précisé par la circulaire n° 2014-059 du 27-5-2014 ainsi que la circulaire n° 2019-122 du 3-9-2019. Ces sanctions ne sont pas exclusives de la sanction pénale.